Méditation pour le premier vendredi de l’Avent
Dans le passage du prophète Isaïe que nous avons entendu lors du premier dimanche de l’Avent, il y a bientôt une semaine, il y avait cette double déclaration adressée à Dieu qui a pu nous sembler paradoxale pour être dite quasiment en même temps :
« Pourquoi nous laisses-tu errer ? » (Isaïe 63, 17) « Voici que tu es descendu ! » (Isaïe 63,19) Qu’est-ce à dire, quoi en penser, quelles conséquences pour nous ?
Ce passage est écrit au temps où le peuple hébreu traverse un grand chaos socio- politique : le royaume est disloqué, une partie du peuple est retenu en exil à Babylone…
Cette situation et ces expressions peuvent nous rappeler une autre situation vécue plusieurs siècles auparavant, du temps de Moïse, lorsque son peuple est maintenu en captivité et sous le joug de l’esclavage… Face au buisson ardent, Moïse entend Dieu lui dire « J’ai vu la misère de mon peuple […] je suis descendu » (Exode 3, 7-8) mais qui se prolonge immédiatement par « Va, je t’envoie ! » (Exode 3, 10)…
Autrement dit, le premier signe de sa venue, la manifestation première de sa présence au milieu de son peuple traversant un chaos, c’est nous-mêmes… en tant qu’envoyés par le Seigneur lui-même… Et c’est effectivement ce que nous retrouverons avec la manière de faire de Jésus lorsqu’il appellera et enverra immédiatement ses disciples pour aller, en avance, là où lui-même Jésus devait passer (Luc 10, 1).
La première Bonne Nouvelle que nous révèle le Seigneur alors que nous redémarrons une nouvelle année liturgique et que nous nous remettons en disposition pour accueillir sa venue parmi nous, c’est donc que le premier lieu de sa venue dans ce monde, dans notre monde, c’est nous-mêmes, c’est en nous-mêmes ! Mais une présence non pas pour nous-mêmes mais pour autrui, pour le peuple, pour le monde…
Cela se confirme avec l’interpellation de Jésus nous invitant à ne pas nous endormir mais à rester éveiller, en étant acteurs actifs et responsables au sein de la maison comme les serviteurs (Marc 13, 34) …
Au final, prendre soin de la maison, notre maison commune comme nous le rappelle si bien le pape François à la toute fin de son encyclique Laudato si (§ 244 & 245) :
« Entre-temps, nous nous unissons pour prendre en charge ce5e maison qui nous a été confiée, en sachant que tout ce qui est bon en elle sera assumé dans la fête céleste. Ensemble, avec toutes les créatures, nous marchons sur ce5e terre en cherchant Dieu […] Dieu qui nous appelle à un engagement généreux, et à tout
donner, nous offre les forces ainsi que la lumière dont nous avons besoin pour aller de l’avant. Au cœur de ce monde, le Seigneur de la vie qui nous aime tant, conJnue d’être présent. Il ne nous abandonne pas, il ne nous laisse pas seuls, parce qu’il s’est définiJvement uni à notre terre, et son amour nous porte toujours à trouver de nouveaux chemins. »
Au début de cette nouvelle année liturgique, fort de cette Révélation que nous fait le Seigneur, dans le contexte particulier qui est le nôtre (situation sanitaire, sociale, ecclésiale) aussi bien au niveau local, national et planétaire, quels sont les moyens que je décide de mettre en œuvre pour accueillir et laisser grandir cette présence réelle de Dieu en moi, non pour moi-même mais pour autrui ? Comment je me dispose et me laisse façonner pour être de ces serviteurs-soignants dans cet hôpital de campagne au plein milieu d’un champ de bataille, que l’Église d’aujourd’hui est fermement appelée à être ?
P Xavier Jahan sj Paray le Monial